Résumé du roman « Odile » de Raymond Queneau
Le personnage principal, Roland Travy, revient à la vie civile après plusieurs mois de service au Maroc, où il a pris part aux hostilités. À Paris, par l’intermédiaire d’un de ses camarades d’armée, Travy devient membre d’un petit groupe de jeunes gens qui se rencontrent dans le quartier de Montmartre et qui pratiquent l’art de vivre sans se fatiguer. Comme le reste des membres de ce groupe, Travy ne travaille pas huit heures par jour dans aucune entreprise et peut gérer son temps par lui-même. Pendant les six mois qui suivent, sans vraiment y aspirer, Travy tourne dans cette société d’escrocs libres.
Roland Travy est un mathématicien amateur, il passe donc plusieurs heures par jour à faire des calculs sans fin qui ne lui rapportent pas un seul sou. Il écrit aussi occasionnellement des articles pour des revues scientifiques. Il a eu une rupture avec sa famille, et le seul parent avec lequel Travy a encore des relations est son oncle. Il a servi dans la colonie pendant longtemps, dispose d’un capital assez important et chaque mois, afin d’éviter la famine de son neveu, il lui prête une certaine somme d’argent.
Après six mois de séjour à Paris, Roland Travy se lie d’amitié avec un groupe de communistes qui s’efforcent avec beaucoup d’empressement de le convaincre d’adhérer au parti et de soutenir activement la cause de la révolution. Le chef du groupe est un certain Aglarès ; sa vie, d’après les récits du poète Saxel, une connaissance de Travy, est imprégnée de secrets et d’incidents inhabituels. Aglarès porte les cheveux longs, un chapeau à larges bords et un pince-nez attaché à son oreille droite par un épais cordon rouge. En général, il ressemble à un photographe antédiluvien, et seule la cravate rouge autour de son cou indique ses habitudes modernistes. Aglarès rassemble autour de lui un certain nombre d’étudiants et, après avoir obtenu leur soutien, il introduit dans la lutte révolutionnaire dans son ensemble l’idée de la prévalence d’un certain principe « irrationnel », « inconscient » dans le monde, vérifiant la justesse des actions entreprises, y compris par lui-même, à l’aide de l’occultisme.
C’est par l’intermédiaire de ce même groupe d’escrocs que Travy rencontre Odile, envers laquelle il commence bientôt à éprouver une sorte d’affection amicale. Odile est dans le groupe dans la position de la petite amie de Louis Tesson, un homme au caractère inégal, dont tout le monde parle avec une sorte d’admiration craintive. C’est un type rude et osseux ; autrefois, Odile l’avait même détesté.
A la demande d’Odile, Travy écrit un article sur l’objectivité des mathématiques. L’article est accueilli très favorablement par Aglarès. Aglarès est ravi de rencontrer enfin l’homme qui, selon lui, a découvert la nature infrapsychique des mathématiques. Désormais, il essaie encore plus activement d’impliquer Travy dans des activités révolutionnaires.
Après un certain temps, Travy et Saxel visitent la secte occulte révolutionnaire de M. Muyard, où Eliza, une jeune médium, invoque l’esprit de Lénine, déjà décédé à cette époque, en donnant soi-disant des instructions posthumes à tous les adeptes de sa théorie révolutionnaire. Saxel est captivé par les charmes d’Eliza et essaie avec diligence de convaincre le groupe d’Aglares de rejoindre la secte Muyard. L’enthousiasme de Saxel, cependant, n’est pas soutenu.
Le soir même où la question de l’adhésion à la secte est discutée en détail lors d’une réunion du groupe, Oscar, le chef de la troupe de Montmartre, tue Tesson, l’amant d’Odile, qui est son frère. L’auteur du crime est arrêté le même jour et, avec lui, plusieurs autres connaissances communes à Roland et à lui se présentent à la police. Travy lui-même ne parvient à échapper à l’arrestation que grâce à l’avertissement opportun d’un jeune bienfaiteur. Au cours des jours suivants, Travy recherche Odile en vain. Son excitation est grande, car elle n’apparaît pas dans sa chambre. Deux jours après le crime, deux policiers se présentent au domicile de Travy et emportent sans ménagement tous ses papiers, dont la majeure partie sont des calculs mathématiques et des extraits de publications hautement scientifiques.
Avec l’aide d’Aglares et d’une de leurs connaissances communes, Travy cherche à lui rendre toutes ses notes, ainsi qu’à dissiper tout soupçon de lui-même et d’Odile. Odile, privée de ses moyens de subsistance après la mort de Tesson et n’ayant pas assez confiance en elle pour aller travailler, part au village pour rester avec ses parents. Travy, ayant perdu sa compagnie, tombe en dépression, mais trouve bientôt un moyen de ramener Odile à Paris : il décide de la prendre comme épouse, l’invitant à officialiser un mariage fictif. Il ne veut vraiment pas devenir son mari, car il est sûr de ne pas ressentir d’amour. Roland Travy convainc son oncle de doubler son salaire dans le cadre de son mariage, part à la recherche d’Odile et, lui offrant son nom de famille et un revenu modeste en échange de simples sentiments amicaux, la ramène, la sauvant ainsi de l’hibernation du village et du désespoir de l’existence. Après avoir signé, les jeunes continuent de vivre séparément et ne se rencontrent que quelques fois par semaine, et Rami, ne croyant pas inconsciemment à son droit au bonheur, éloigne progressivement Odile de lui-même de plus en plus.
Pendant l’absence de Rami à Paris, un coup d’État a lieu dans le groupe d’Aglarès : Saxel en est expulsé, et sur la feuille diffamant le poète, à côté d’autres signatures, on trouve la signature de Travy, qui voit effectivement ce papier pour la première fois. De plus, pour étendre l’influence du groupe parmi les Parisiens radicaux, on y admet des gens sans scrupules, sciemment capables de méchanceté et de trahison. Un tel retournement de situation inattendu contribue au fait que pour Roland Travy une certaine période d’éducation politique se termine, et il s’éloigne peu à peu des communistes. Travy se débarrasse de l’idée qu’il se fait de lui-même un mathématicien, ou plutôt, une machine à calculer qui perd constamment le compte, et essaie de « construire » à partir des débris de son orgueil un nouveau refuge plus humain, dans lequel il y aurait une place pour un sentiment tel que l’amour pour une femme. Odile est la première à avouer son amour à Travy. Travy, dans l’espoir de réfléchir à sa vie future et de se découvrir lui-même, part quelques semaines en voyage avec ses amis en Grèce. Là, il trouve la force d’abandonner le désir de souffrir qui le tente constamment et, en regardant dans son âme, de comprendre qu’il aime Odile. En arrivant à Paris, il parvient néanmoins à retrouver la disposition d’esprit d’Odile, n’ayant plus peur d’être simplement une personne « normale », et commence à considérer cet état comme un tremplin à partir duquel il peut sauter vers l’avenir.